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lundi 10 mai 2010

Parler de la guerre, cela implique-t-il nécessairement d'être belliciste ?

Il arrive que l'on me demande, au vu notamment du sujet du présent blog, si j'aime la guerre. La réponse est claire : non, je n'aime pas la guerre. Pour reprendre les mots de Frédéric Encel (L'art de la guerre par l'exemple) :
nous estimons en âme et conscience que les combats entre petits soldats de plomb sont préférables - en ce qu'ils n'entraînent point de souffrances ni de désolations - aux combats réels.


Alors pourquoi en parler ?

Déjà, je tiens à repréciser que mon blog est consacré à la défense (de plus en plus, je le constate, aux relations internationales au sens large, et donc à tout le spectre du smart power, pour reprendre un terme à la mode) et non pas strictement à la guerre ou aux armements.

Ensuite, parler d'un phénomène, l'étudier, le décrire ou le commenter, ne signifie en aucune manière l'approuver ou le préconiser. Il se trouve que la guerre semble être une constante (ou du moins, un fait fortement récurrent) dans l'histoire de l'humanité, ce qui ne laisse de m'interpeler. De plus, je l'ai assez souvent indiqué, elle touche, au-delà de la stratégie, à quantité de domaines (économie, industrie, politique, géographie, philosophie, technologie, sociologie, architecture, écologie, démographie, culture...) qui, à des degrés divers, m'intéressent. La chose militaire est au coeur de nos sociétés, de nos civilisations, c'est un fait, que l'on le veuille ou non, et ceci quel que soit l'état du fameux lien "armée-nation". Car après tout, nous ne sommes jamais aussi forts que quand il s'agit de générer des externalités (pris dans une acception plus étendue que le champ économique) aux quatre coins du monde, même quand nos dirigeants ou nos médias n'en rendent pas compte, et si nous, Européens, avons eu tendance à évacuer la guerre de notre univers mental (et en un sens, c'est une bonne chose).

Quant à savoir si les conflits armés sont inhérents à notre espèce et donc inéluctables, j'avoue que la question me dépasse. Relire Gaston Bouthoul et le remettre au goût du jour devrait apporter quelques réponses, mais c'est un autre débat. De même que le fait de savoir si telle ou telle guerre est "juste", ou si la guerre en général peut être juste.

J'en appelle aux deux plus grands théoriciens de la guerre, j'ai nommé Sun Zi et Carl von Clausewitz, qui, pour avoir disserté dessus en long, en large et en travers, n'en demeurent pas moins mesurés à son sujet.

Voilà ce que dit le premier dans son Art de la Guerre (traduction du Père Amiot) :
Sans bataille, immobiliser l’armée ennemie, voilà qui est l’excellent. En agissant ainsi, la conduite du général ne différera pas de celle des plus vertueux personnages ; elle s’accordera avec le Ciel et la Terre dont les actions tendent à la production et à la conservation des choses plutôt qu’à leur destruction. Jamais le Ciel n’approuva l’effusion du sang humain : c’est lui qui donne la vie aux hommes ; lui seul doit être le maître de la trancher. (article III)

En règle générale, faire la guerre n'est pas le bon. Seule la nécessité doit la faire entreprendre. Quelles que soient leur issue et leur nature, les combats sont funestes aux vainqueurs eux mêmes. Il ne faut les livrer que si la guerre ne peut être autrement menée. (article XII)
Quant au second, voici ce qu'il dit dans son De la guerre :
à l'origine, la stratégie ne vise la victoire - le succès tactique - que comme moyen ; en dernière analyse, elle a pour fin les objets qui doivent mener directement à la paix.
Bref, s'intéresser à la guerre et à ses modalités ne signifie pas être belliqueux ni encourager ses semblables à s'entretuer.

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