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Mon Blog Défense

samedi 30 mai 2009

CAMPS contre MANPADS

Les missiles sol-air à très courte portée, MANPADS (Man Portable Air Defense Systems), constituent une menace, agitée principalement par les guérillas et groupes terroristes, contre l'aviation militaire mais aussi et surtout civile, et à qui de nombreux analystes prêtent un fort "potentiel de croissance".

Un exemple : la découverte, relatée par Pour convaincre, d'un missile armé en Ingouchie et qui aurait pu s'ajouter à la liste des attaques contre l'aviation civile (liste incomplète). Ou même l'arrestation il y a quelques jours à New-York de terroristes supposés cherchant à acquérir des missiles Stinger.

Un Stinger
crédits : cmdc.us

En juin doivent débuter les essais à bord d'un Embraer EMB-120 du système CAMPS, du suédois Saab, destiné à la protection des aéronefs civils. CAMPS devrait être le premier système européen certifié par l'Agence Européenne de la Sécurité Aérienne. Pour le moment, Saab indique avoir un client, une compagnie charter brésilienne, mais 20 autres transporteurs seraient intéressés. La cible prioritaire est celle des VIP, le fabricant jugeant que le transport commercial de passagers, malgré sa taille, n'est pas globalement demandeur...à moins que, bien sûr, un attentat d'envergure n'ait lieu.

Le système CAMPS
crédits : airpic.co.za

CAMPS s'appuie sur des leurres pyrophoriques (i.e. qui s'enflamment spontanément au contact de l'air) développés par le britannique Chemring.

La brochure commerciale de Saab met en avant le fait que près de 100 000 RPG seraient en vente sur le marché noir mondial, avec un prix d'entrée d'à peine 5000 dollars. Mais également sur le fait que lors des dix dernières années, près de 500 personnes ont trouvé la mort dans des attaques contre des avions civils.

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vendredi 29 mai 2009

Iran : les candidats à l'élection présidentielle

Seul 4 candidats (sur 475) ont vu leur dossier validé par la Conseil des Gardiens (où l'influence d'Ali Khamenei est prépondérante) en vue de l'élection présidentielle iranienne qui aura lieu le 12 juin prochain, et qui opposera Mahmoud Ahmadinejad à 3 challengers.

Si l'on ne présente plus l'actuel président, qui sont les trois autres ?

Avant de les passer succinctement en revue, quelques points communs : ce sont tous des hommes, musulmans chiites. Les membres des minorités sunnite, juive, chrétienne et zoroastrienne ne sont pas autorisés à se porter candidat pour cette élection. Par ailleurs, aucune des 42 femmes n'a été retenue par le Conseil des Gardiens, comme lors de toutes les précédentes élections présidentielles.

***

Mir Hossein Moussavi

Mir Hossein Moussavi est ancien premier ministre d'Iran (1981-1989, notamment pendant la guerre face à l'Irak), d'ailleurs le dernier avant la réforme constitutionnelle abolissant le poste. Né en 1941 à Khameneh, il est considéré comme un modéré. Ayant refusé d'être candidat en 1997 (comme en 2005), il avait alors de facto soutenu la candidature de Khatami, finalement élu, dont il était devenu un conseiller. Ce dernier lui apporte son soutien pour l'élection qui arrive.

En termes de positionnement, il se définit comme un réformateur mais dans l'esprit (conservateur) de la Révolution de 1979. Il a plusieurs fois pris position pour une relative libéralisation de la société : fin du monopole d'état sur les chaînes de télévision, forces de police ne dépendant plus du Guide Suprême mais du Président élu, rapprochement du processus de décision politique (relative boîte noire actuellement, particulièrement pour se qui relève du budget) et du peuple, enseignement des langues minoritaires à l'école...

Au niveau international, il souhaite privilégier une approche plus fondée sur le dialogue, notamment avec les Etats-Unis. Sur le dossier du nucléaire, il déclare, et c'est une position largement partagée, que sa maîtrise à des fins civiles est un droit pour l'Iran, tout en critiquant les dépenses exorbitantes engendrées par le pouvoir en place.

Il s'affiche comme le candidat le plus sérieux face au président sortant, car il garde notamment l'estime de nombreux Iraniens pour sa gestion du pays pendant la "guerre subie". Il peut également s'appuyer sur le soutien de la minorité Azeri du Nord du pays.

En vue de mobiliser son électorat, il a lancé récemment un quotidien, Kalameh Sabz, dont l'objectif est de communiquer sur sa vision de la société iranienne, et dont le tirage a pour objectif quelques dizaines de milliers d'exeplaires.

Ses partisans ont mis à profit le site communautaire Facebook afin d'organiser des meetings de soutien, ce qui a poussé les dirigeants iraniens à interdire le site.

***

Mehdi Karroubi


Né en 1937, ce membre du clergé est un ancien compagnon de route de Khomeini, rencontré lors de ses études religieuses à l'Université de Téhéran et fut le premier à se déclarer candidat pour l'élection qui vient.

Ancien président du Parlement (1989-1992 et 2000-2004), il est également le fondateur et le dirigeant du Etemad-e-Melli (Parti de la Confiance Nationale), qui fait partie de la "mouvance réformiste" (très hétérogène). Karroubi se considère lui-même comme un "réformateur pragmatique", même si beaucoup au sein du camp réformateur lui contestent l'épithète. Dans les années 1980, il était membre d'un groupe de dirigeants en faveur d'un interventionnisme fort de l'État dans l'économie, mais promouvant une liberté d'expression plus importante (tout cela est certes relatif).

Il fut candidat malheureux en 2005, arrivant troisième au premier tour derrière Rafsandjani et Ahmadinejad. Il avait alors dénoncé une manipulation des Gardiens de la Révolution, les Pasdaran, impliquant notamment un fils du Guide Suprême, en faveur du président actuel. Il avait par la suite démissionné de toutes ses fonctions, en particulier de celle de conseiller du Guide Suprême.

Sur le plan politique, il a par le passé exprimé de opinions en faveur des minorités religieuses en Iran, et formulé certaines critiques vis-à-vis du Conseil des Gardiens, instance suprême de direction du pays, notamment en ce qui concerne son contrôle sur les élections. Il est plus discret sur les questions économiques.

Au niveau international, il a critiqué les déclarations d'Ahmadinejad sur l'Holocauste (dont il estime qu'elles sont, comme les propos sur Israël, nuisibles à l'image de l'Iran) et prône plus de dialogue avec les États-Unis, particulièrement sur le dossier nucléaire. Il voit quelques signes positifs dans l'élection de Barack Obama :
Unlike his predecessor (George W Bush) who has put us into the axis of evil and insulted the Iranian nation with baseless accusations, Mr. Obama has at least a different rhetoric which is worth considering

Certains le voient comme la surprise possible de cette élection, un peu comme Ahmadinejad l'avait été en 2005, soulignant que parmi les trois outsiders, il est le plus organisé, avec notamment un parti et un organe de presse derrière lui.

***

Mohsen Rezai


Né en 1954, il est l'ancien chef des Pasdaran (1981-1997), organisation militaire parallèle à l'armée iranienne, en charge de la sécurité intérieure, des frontières mais également de la force balistique stratégique. Il est aujourd'hui Secrétaire en charge du commerce au sein du Conseil de Discernement, organe administratif qui possède une certaine délégation de pouvoir de la part du Guide Suprême, dont il dépend.

Bien qu'ayant critiqué la politique d'Ahmadinejad à la fois sur le plan économique et diplomatique, il est à ranger, sans surprise, dans le camp des conservateurs. Du côté des Américains on le considère comme un "hardliner". Il avait retiré sa candidature à l'élection de 2005 peu avant le lancement officiel de la campagne. Cette année, il semble qu'avant de se porter candidat, il ait cherché sans succès une union des conservateurs face au président sortant. Il s'apprête à affronter les urnes sans étiquette, et fait figure d'outsider parmi les outsiders, même si son CV devrait lui attirer quelques voix conservatrices, notamment par le biais de ceux qui, contrairement à 2005, n'ont pas annoncé leur soutien à Ahmadinejad.

Il figure actuellement sur la liste des personnes recherchées par Interpol, pour son rôle supposé dans l'attentat suicide contre le centre culturel juif de Buenos Aires en 1994.


***

Le président sortant, Ahmadinejad, reste favori, d'autant que le Guide Suprême Khamenei, a appelé à voter contre tous les candidats prônant une ouverture avec l'Occident. Un des véritables enjeux de cette campagne est le taux de participation, qui pour certains serait largement truqué par les autorités : alors qu'il affiche officiellement des scores honorables (plus de 50%), il serait en réalité beaucoup plus faible. Les réformateurs, Moussavi en tête, reprochent aux dirigeants actuels de ne pas en faire assez pour mobiliser les 46 millions d'électeurs : une forte mobilisation pourrait leur être profitable.

Bien sûr, il faudrait revenir plus en profondeur sur le rôle et les attributions précises du Président de la République, face au Conseil des Gardiens, au Guide Suprême ou au Majlis, pour apprécier l'importance relative de cette élection et son impact intérieur et sur la scène internationale.

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jeudi 28 mai 2009

L'armée est le plus gros propriétaire terrien en France

Alors que l'on parle du "Pentagone à la française" devant être mis en oeuvre dans le XVème arrondissement de Paris et que la France se dote d'une base militaire à Abu Dhabi, l'hebdomadaire Challenges, dans un dossier intitulé "Qui possède la France" (numéro du 20 au 27 mai), rappelle que l'armée est le plus plus gros propriétaire terrien en France : ele possède 0,5% du territoire national, soit plus de 250 000 hectares. Son patrimoine global est estimé à environ 21 milliards d'euros.

Certes, la tendance est à la diminution, à l'époque des privatisations et des cessions poussées par l'Etat : les ventes ont ainsi rapporté jusqu'ici, selon Challenges, aux alentours d'un milliard d'euros. Soit, pour donner un ordre de grandeur, même pas 2% du budget annuel de la défense nationale.

Cessions qui touchent l'ensemble des composantes de l'Etat et qui font partie d'une démarche plus globale de recherche d'économies, notamment dans le domaine immobilier, visant entre autres à compenser les hausses prévues et prévisibles des coûts d'équipements à moyen terme.

La Citadelle de Lille, un des nombreux trésors du patrimoine de l'Armée Française

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mercredi 27 mai 2009

[Le blog de la semaine] : tir groupé

Cette semaine est l'occasion de mettre à jour ma blogroll avec des blogs défense/sécurité francophones déjà installés (chacun sur son créneau plus ou moins spécialisé), et que suis depuis un certain temps :
Ils sont d'ailleurs déjà tous cités par les blogs que je référence. Je dois en oublier quelques-uns, mais ils devraient bientôt suivre. Je me rends compte que ça commence à faire beaucoup, faudrait que j'y mette un peu d'ordre comme d'autres s'y essaient.

A suivre également, une blogroll anglophone.

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Les Etats-Unis proposent à l'Iran...un match de foot

Alors que les deux pays n'entretiennent plus de relations diplomatiques depuis presque 30 ans, et que le dossier du nucléaire iranien les oppose, les États-Unis ont transmis à l'Iran une proposition de match de foot amical .

La dernière rencontre officielle entre les deux équipes remonte à la Coupe du Monde 1998 en France, l'Iran ayant pris le dessus (2-1). Par la suite, un math amical a eu lieu en 2000 en Californie (1-1), et un projet de matchs amicaux en vue de la Coupe du Monde de 2010, en Afrique du Sud, avait été évoqué mais finalement abandonné.

L'Iran a annoncé avoir bien reçu la proposition et est en train de l'étudier.

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mardi 26 mai 2009

GPS : les Etats-Unis se veulent rassurants

Suite au rapport de la GAO, évoqué ici récemment, annonçant une possible dégradation du système GPS à parti de 2010 (la faute à un retard dans le programme de modernisation des satellites de la constellation), l'USAF a voulu faire taire les rumeurs et peurs pouvant germer dans l'esprit des militaires, industriels ou surtout du grand public.

Ainsi, le colonel Dave Buckman s'est montré rassurant sur Twitter (il faut être à la page !) :
No, GPS will not go down
Même s'il a reconnu que les conclusions du GAO étaient fondées, il a affirmé être confiant sur la capacité de l'USAF à garder la maîtrise de la situation :
We have plans to mitigate risks and prevent a gap in coverage
Deux lancements sont prévus, en août 2009 et début 2010, pour permettre à la constellation GPS de rester au-dessus du nombre de 24 satellites opérationnels, un minimum pour une couverture et une précisions optimales. Le rapport de la GAO pointait des problèmes techniques pouvant impacter ces lancements. Le Colonel Buckman ne dit pas s'ils ont été résolus ni comment l'USAF compte les résoudre.

Un missile Excalibur (Raytheon) à guidage GPS
crédits : ubergizmo.com

Alors forcément, Twitter avec sa limitation à 140 caractères par post force à être synthétique voire laconique et expéditif. Est-ce à dire que la choix de la plate-forme de micro-blogging a servi à compenser l'absence ou le manque d'arguments ?

En attendant, au risque de se répéter, il faut souligner qu'au-delà des problèmes économiques potentiellement importants, une dégradation du service GPS aurait un impact militaire avec notamment une perte de précision sur les frappes aériennes à base de "munitions intelligentes", qui occupent une place importante dans la doctrine américaine, et potentiellement plus de victimes civiles "collatérales".


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lundi 25 mai 2009

Russie-Europe : le cas de la Transnistrie

Ce mois-ci, le thème proposée par l'AGS est La Russie en Europe ou face à l'Europe ?. Le court article qui suit est une analyse sommaire, par un non spécialiste, d'un sujet qui concerne au premier chef l'Union Européenne et son voisin russe, mais qui rencontre relativement peu d'échos dans la presse depuis une quinzaine d'années ou même ces temps-ci, malgré la proximité des élections européennes (deux semaines à l'heure où j'écris).

***

Début mai, l'Union Européenne a lancé un partenariat avec six anciens états soviétiques. Parmi ceux-ci, la Moldavie, successeur de la République socialiste soviétique de Moldavie (RSSM), créée par le Soviet Suprême en 1940 à la suite du Pacte germano-soviétique, et indépendante depuis 1991. Elle compte environ 4,3 millions d'habitants, dont 650 000 pour Chisinau, sa capitale. Son territoire est enclavé entre la Roumanie, au sud-ouest, et l'Ukraine, au nord-est : il correspond principalement à deux tiers de l'ancienne Bessarabie, prise aux Roumains par l'URSS, l'autre tiers étant revenu à l'Ukraine.

La Transnistrie intégrée à la Moldavie

Mais pas seulement, car Staline était taquin quand il dessinait les frontières de ses républiques socialistes soviétiques. Ainsi fut rattachée à la RSSM la Transnistrie, une bande de terrain sur la rive gauche du Dniestr (son nom signifie littéralement "au-delà du Dniestr", et auparavant rattachée à l'Ukraine (plus précisément à la République autonome socialiste soviétique de Moldavie, créée dès 1924, qui appartenait à l'Ukraine). Au départ largement peuplée de Moldaves, la Transnistrie, sous l'impulsion soviétique, a connu une arrivée conséquente d'immigrants russes et ukrainiens à partir des années 1960. Si bien qu'en 1989 les Moldaves ne constituaient plus que 40% de sa population, estimée à 550 000 personnes en tout.

crédits : wikipédia

Les troubles du mois d'avril

Les évènements du mois dernier, qui ont vu des manifestations pacifiques de masse mais également de pillage dans les rues de Chisinau, suite aux élections du 5 avril, remportées par le parti du président communiste Voronine, sont caractéristiques de la situation moldave depuis sa sortie de l'URSS : un tiraillement constant entre l'Est et l'Ouest. Les drapeaux roumain et européen déployés sur le toit du Parlement par des casseurs ont bien entendu provoqué des accusations d'ingérence, notamment de la part des Russes, envers la Roumanie qui a aussitôt démenti...

D'autres y voient une opération rondement menée de "false flag", les "casseurs" agissant avec la complicité d'une partie de la police sous la houlette russe. Un échange de bons procédés en quelque sorte, entre deux entités, les pouvoirs moldave et russe, qui ne s'apprécient pourtant guère : tu t'assures que le parti prorusse m'apporte son soutien dans ces élections, que l'opposition qui manifeste contre moi est décrédibilisée, et en échange je t'offre une occasion de mettre la Roumanie et l'UE en porte-à-faux. Une explication moins compromettante pour Voronine consiste en l'implication exclusive de son Ministre de l'Intérieur, George Papuk, en vue de freiner l'élan pro-occidental de la Moldavie.

Des manifestants moldaves brandissant le drapeau de l'UE sur le Parlement à Chisinau
crédits : LA Times

Bref, ces troubles sont révélateurs de l'influence que continue d'exercer le géant russe sur la petite république moldave depuis son indépendance. Petite république qui est une voisine directe de l'Union Européenne depuis que la Roumanie en fait partie. Oui, encore un voisin turbulent...car pour en revenir à la Transnistrie, bien qu'elle fasse partie du territoire moldave, elle n'a jamais réellement été sous son autorité, son statut étant source d'un conflit qui dure depuis 18 ans.

Petit retour en arrière

Lorsque la Moldavie accède à l'indépendance, en 1991, elle demande à la 14ème armée russe, stationnée sur son territoire, de se retirer. Ce que cette dernière fait en partie, puisqu'elle installe ses quartiers à Tiraspol, "capitale" de la Transnistrie. La Moldavie a déjà décidé que le Roumain serait la langue officielle unique sur l'ensemble de son territoire. Les Russo-Ukrainiens, majoritaires en Transnistrie, s'en emeuvent, et un "référendum" organisé fin 1991 dans la région indique que la population locale demande l'indépendance pure et simple.

En 1992, la République de Transnistrie est proclamée unilatéralement, avec Tiraspol pour capitale. Une guerre s'ensuit, mettant aux prises l'armée de Moldavie face à des rebelles transnistriens russophones et la 14ème armée russe, avec à sa tête un certain Lebed. Fin 1992, un accord est signé entre la Moldavie et la Russie de Boris Eltsine. Une force de maintien de la paix de la CEI (à majorité russe) est déployée à la "frontière" transnistrienne.

Depuis règne une sorte de statu quo, consolidé par le Mémorandum Primakov établi à Moscou en 1997, et qui permet notamment à la Transnistrie une certaine autonomie sur le plan économique, tout en restant une région moldave. Mais statu quo ne signifie pas abolition des griefs ou même paix. Tiraspol accuse Chisinau d'asphyxier son économie (qui n'a vraiment pas besoin de ça !) avec la complicité de Kiev, notamment après
  • l'introduction dès 2006 d'une disposition obligeant les entreprises transnistriennes qui souhaitent exporter à s'enregistrer auprès de l'administration centrale moldave
  • la mise en place de taxes prohibitives sur certaines matières et produits par l'Ukraine, passage obligé de nombreuses exportations transnistriennes (cf. carte ci-dessus)
De son côté, la Moldavie promeut une image largement négative de la Transnistrie, qui n'est pour elle qu'une région sécessionniste, auprès de la communauté internationale, mettant en avant les trafics d'armes qui s'y déroulent, et qui alimenteraient de nombreux conflits de par le monde, ainsi que les entorses aux Droits de l'Homme de ses dirigeants.

Et l'Union Européenne dans tout ça ?

En 2003, le Conseil de l'UE adopte, dans le cadre de la PESC, une position hostile aux dirigeants transnistriens, les accusant d'empécher la résolution du conflit et leur imposant des restrictions relatives à leur circulation sur le territoire communautaire. De même le Parlement Européen a pris de nombreuses résolutions condamnant les atteintes aux Droits de l'Homme observées sur le territoire moldave, mais plus spécifiquement transnistrien, et notamment l'emprisonnement de journalistes indépendants. Parallèlement, l'Union Européenne note les efforts de la Moldavie pour se rapprocher d'elle, notamment par l'intermédiaire de son voisin roumain.

Pour le reste, il est assez désolant de constater que l'Union Européenne est largement hors du coup au profit de Washington (subventions afin de moderniser l'armée moldave) et de l'OTAN (participation de la Moldavie aux opérations Cooperative Longbow/Lancer en 2006* et accords bilatéraux avec l'OTAN au sein du Partenariat pour la Paix) mais surtout de Moscou, malgré une mission d'observation débutée en 2005. Une situation d'autant plus regrettable que, comme indiqué plus haut, la Transnistrie se trouve tout prêt de sa frontière orientale. Et que l'existence d'une zone de conflit militaire larvé si près est inacceptable. Ceci marque une fois de plus les lacunes de l'UE en termes de géopolitique de proximité, qui se projette difficilement au-delà du rôle de "médiateur".

La Russie en position de force ?

La situation de la Transnistrie en rappelle partiellement deux autres : l'enclave russe de Kaliningrad et le Kosovo. Ainsi, au vu du déroulement du dossier kosovar (déclaration unilatérale d'indépendance suivie de la reconnaissance par de nombreux pays occidentaux dont les USA et la France), la Russie a beau jeu d'appeler à ne pas en faire un cas isolé, une exception en somme, comme le souhaiteraient les Américains, peu enclins à satisfaire toutes les tentations indépendantistes en Europe ou ailleurs.

Pour Moscou, les régions séparatistes géorgiennes ou la Transnistrie sont à considérer de façon équivalente. Et les minorités russes d'Europe Centrale et Orientale sont à protéger au même titre que les Albanais du Kosovo. La Russie essaie de mettre les USA face à leurs contradictions et leur "deux poids, deux mesures". Tout en faisant attention aux situations en Tchétchénie et au Daghestan : oui au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, mais au cas par cas. En bref, oui quand ça m'arrange et non dans le cas contraire. Du "faites ce que je dis, pas ce que je fais", mais après tout c'est, malheureusement, le lot des relations internationales.

Il convient de mentionner le fait que sur le Kosovo, l'UE n'a pas non plus une position commune, puisque des pays comme l'Espagne, la Grèce, la Roumanie ou la Slovaquie ne reconnaissent pas son indépendance, souvent pour des raisons de politique intérieure. Il en est de même, assez logiquement, pour la Moldavie.

Un "référendum" transnistrien encouragé par la Russie en septembre 2006 a conclu à une écrasante victoire du oui à l'indépendance et au rattachement à la CEI. L'UE comme l'OSCE, contrairement au gouvernement russe, ont indiqué que ce vote n'était pas régulier et que ses résultats ne seraient pas reconnus.

Pendant ce temps, à l'approche de l'élection du président moldave par le Parlement le 28 mai, la Russie continue de jouer l'intox : ainsi le Ministère des Affaires Etrangères se dit optimiste sur la possibilité d'un règlement pacifique de la situation, tout en stigmatisant les carences institutionnelles en Moldavie, ou en relayant les dénonciations des provocations nationalistes roumaines. En attendant, la position officielle de Moscou reste celle d'une intégrité territoriale de la Moldavie, avec une autonomie réelle pour la région transnistrienne.

En conclusion

Bien qu'aux portes géographiques de l'UE, le dossier transnistrien échappe largement à cette dernière. Il prend pour l'instant des airs de conflit post Guerre Froide entre les USA et la Russie, déterminée à ne pas perdre sans combattre sa traditionnelle zone d'influence héritée de l'URSS, au profit de la démarche américaine de containment.

L'avenir proche et moins proche

Quels scénarios sont possibles dans le futur à moyen ou long terme ?
  • Un statu quo avec plus ou moins d'autonomie réelle accordée à la Transnistrie, et des progrès réels sur les plans sociaux et économiques, aun double rapprochement UE/CEI, avec en toile de fond les figures de Washington et de l'OTAN : est-il concevable qu'un état tel que la Moldavie ait des relations équilibrées entre les 3 (voire 4) entités ?
  • Un rattachement de la Moldavie en l'état à la Roumanie, peu probable, au vu de l'hostilité de Moscou et de la Transnistrie, ainsi que de nombreux moldaves
  • Une intégration de la Moldavie en l'état à l'UE, sans avoir réglé au préalable le problème transnistrien, ce qui rappellerait, à une autre échelle et avec la Russie à la place de la Turquie, le cas chypriote, pas forcément glorieux pour l'Europe
  • Une divergence de destin entre Moldavie et Transnistrie, qui accèderait à l'indépendance et se rapprocherait de la CEI pendant que son nouveau voisin ferait de même avec la Roumanie et l'UE
A suivre dès le résultat des élections moldaves connu...

***

*A noter que la Moldavie a refusé, au nom de sa position de neutralité inscrite dans la constitution, de participer aux manoeuvres Longbow/Lancer de 2009, qui se déroulent en ce moment même.

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samedi 23 mai 2009

RAPID : une initiative en faveur des PME

Le Ministère de l'Economie et le Ministère de la Défense français ont annoncé le 15 mai dernier la création du Régime d'Appui aux PME pour l'Innovation Duale (RAPID). Pour rappel, une technologie est dite duale lorsqu'elle peut avoir des applications à la fois dans le domaine civil et dans le domaine militaire.


Le Ministère de la Défense est le premier acheteur public en France, consacrant notamment, par le biais de la DGA, 700M€ à des études amont. Il est à l'origine de 2/3 des crédits de R&D alloués aux entreprises françaises.

Spécifiquement réservé aux PME de moins de 250 salariés, pouvant agir en consortium ou en partenariat avec des centres de recherche, RAPID est une subvention accordée aux projets spontanés, c'est-à-dire issus des entreprises elles-mêmes. L'ensemble des conditions d'éligibilité ainsi que la procédure de candidature sont détaillées sur le portail de l'armement.

Il est intéressant de noter que sont considérées aussi bien les initiatives relevant de la recherche industrielle que du développement (expérimental), ce qui permet d'intervenir à plusieurs niveaux de la chaîne de valeur...même si évidemment, l'entreprise doit démontrer le potentiel économique. Certes encore, les montants annoncés pour le moment (dotation de 10 M€ du Fond de Compétitivité des Entreprises) sont assez modestes, mais un tel régime, pour une fois dédié aux PME, va dans le bon sens en ce qui concerne le soutien à l'innovation., notamment s'il respecte les conditions de délais qu'il affiche. La dimension duale (a priori plutôt orientée dans le sens militaire -> civil dans le contexte RAPID) ne concerne évidemment pas que les petites entreprises, comme je l'ai déjà évoqué sur ce blog. Pour une PME, la dépendance vis-à-vis d'un seul client, qui plus est sur un marché monopsonistique, peut être un désavantage, en cas de perte du marché ou de réductions de budget. Le fait d'avoir dès l'amont réfléchi à des débouchés commerciaux "civils" et d'être en mesure de servir ce type de marché constitue un atout certain.

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vendredi 22 mai 2009

GPS : Global Phailing System ?

crédits : Team Nirvana


Qu'on excuse le jeu de mot approximatif, mais l'heure est grave, enfin peut-être.

Un rapport récent de la GAO (Government Accountability Office), Cour des Comptes américaine, pourrait faire l'effet d'une bombe : sans le lancement de nouveaux satellites à très brève échéance, le système GPS pourrait rencontrer de sérieux problèmes de précision et de couverture dès 2010, la faute à un matériel qui commence à être âgé et menaçant de lâcher. Bien sûr, les conséquences militaires (navigation, patrouille, acquisition de cible et guidage de munition, sauvetage, mise à profit du brouillage...) et économiques (transports route/fer/bateau/aérien, géomarketing, télécommunications, commerce/banque, météorologie et climatologie...) seraient énormes au niveau mondial : les applications du GPS sont partout, et depuis quelques années elles ont même envahi l'électronique grand public. Le marché mondial pourrait atteindre près de 50 milliards de dollars en 2012, selon une étude de BCC Research datant de 2007.

Bien sûr, le système GPS dans son intégralité n'est pas menacé à courte échéance. Cependant, il pourrait accuser une perte de qualité de service : la constellation est actuellemen composée de 30 satellites. Pour assurer un niveau optimum de couverture, 24 sont nécessaires. Selon la GAO, il y a une probabilité de 95% que ce nombre soit encore atteint en 2010, et "seulement" de 80% pour la période 2010-2014.

Le problème est que le programme de remplacement des satellites par l'USAF a environ 3 ans de retard (en plus d'un dépassement de plusieurs centaines de millions de dollars). Alors que le premier lancement "nouvelle génération" devait avoir lieu en 2006, il sera réalisé fin 2009. Enfin, dans le meilleur des cas, car de sérieux problèmes techniques se posent encore, mettant en risque cette date prévisionnelle. Il faut dire que le développement de ces satellites de remplacement n'a pas été épargné par les difficultés : composants obsolètes, transmetteurs défaillants, alimentation en panne...
Le rapport de la GAO met aussi en avant le manque d'anticipation des militaires, très préoccupés par le signal GPS au jour le jour mais peu informés d'une possible dégradation dans un futur pourtant très proche.

Dans l'attente, des solutions dégradées existent :
  • utilisation de satellites ne faisant pas partie de la constellation GPS mais ayant des capacités leur permettant d'assurer la transmission de signaux GPS
  • prolongation de la vie des satellites de la constellation en supprimant toutes leurs tâches non directement liées au GPS
  • identification par les fabricants de matériel GPS de moyens permettant de fonctionner avec une bonne précision avec moins de 24 satellites
Pour le moment, aucun vent de panique n'a envahi le monde, trop occupé à d'autres fléaux bien plus meurtriers et immédiats. D'autant que les analystes ne voient aucune raison pour que le fort engouement vis-à-vis du GPS s'estompe ou ralentisse dans les années à venir, et que les fabricants se veulent rassurants, à l'image de Jessica Myers, porte-parole de Garmin :
At this point in time, we're confident that the system will continue to provide the signals that our customers and the nation need
En même temps, pourquoi scieraient-ils la branche sur laquelle ils sont assis ?

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jeudi 21 mai 2009

Louis Gallois : Il manque 3 000 ingénieurs en aéronautique

Le Figaro d'hier rapporte, en référence à un entretien devant paraître dans l'Express d'aujourd'hui, ces paroles du patron d'EADS, champion européen de l'aéronautique et de la défense :
Nous manquons d'ingénieurs en Europe - de 3.000 à 3.500 chaque année pour la seule filière aéronautique. Il faut redonner le goût de ces carrières à nos jeunes
Comme un écho lointain à mes articles récents sur les entreprises préférées des futurs ingénieurs et la formation au sein des écoles d'ingénieurs françaises...

Louis Gallois veut voir dans la crise économique actuelle quelques raisons de lancer, au niveau européen, des projets d'envergure afin de préparer le futur :
La crise pourrait être l'occasion d'exprimer une ambition européenne industrielle forte, et pas seulement dans la défense. C'est le moment d'engager de grands programmes européens. Les sujets ne manquent pas : voiture électrique, nanotechnologies, confinement du CO2, l'homme dans l'espace ou les drones militaires
Parallèlement, il annonce, pour la première fois, une date pour le premier vol de l'A400M : cela devrait être pour la fin de cette année, avec une marge d'erreur de quelques semaines. Une paille, pour un programme déjà en retard de quatre ans...

Concept de l'A400M
crédits : Airbus Military / Taysset Pictures

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mercredi 20 mai 2009

Un livre sur les pôles de compétitivité

Alors que les pôles de compétitivité lancés (et même labellisés) en 2005 ont fait l'objet récemment d'une évaluation par les députés en vue d'un réajustement (à l'heure où j'écris ces lignes, 12 sont en "repêchage"), je vous conseille vivement un livre sur le sujet publié par le CEPREMAP (Centre pour la Recherche Économique et ses Applications) début 2008.Cet ouvrage fait le point sur les forces et faiblesses de l'approche des pôles de compétitivité, à l'opposé de l'équité sous-tendue par une démarche d'aménagement du territoire, et qui repose sur l'argument selon lequel un regroupement géographique de petites et grandes entreprises (mais également de laboratoires et universités) du même domaine permet une amélioration de leur productivité (on pense à l'exemple célèbre de la Silicon Valley).

S'appuyant sur l'étude des prédécesseurs des pôles de compétitivité, les SPL ou systèmes productifs locaux, mis en place en France durant les années 1990, les auteurs montrent que si ces clusters (nom anglo-saxon) permettent des gains (dont les mécanismes sont analysés), ceux-ci n'ont pas l'ampleur annoncée par les plus fervents promoteurs de l'initiative. Et une amélioration marginale requiert des efforts colossaux en termes de concentration géographique. Les acteurs du marché n'ayant pas un comportement optimum, l'intervention publique joue un rôle non négligeable dans la constitution de ses pôles. Cependant, un pôle de compétitivité ne se décrète pas ex nihilo par pur volontarisme politique (plus ou moins électoraliste), notamment dans un pays comme la France où les travailleurs sont peu mobiles. D'autant qu'en général, les entreprises intègrent de façon naturelle leur localisation (et donc le rapprochement géographique éventuel avec des partenaires) dans leur stratégie globale. Ce qui signifie très concrètement qu'une part non négligeable des pôles labellisés existaient déjà officieusement.

Un ouvrage parfois un peu technique mais somme toute plutôt pédagogique, qui montre clairement que l' "effet cluster" est de toute façon secondaire par rapport à d'autres composantes : stratégie de l'entreprise, organisation interne, efficacité et efficience des processus.
Carte des pôles de compétitivité
crédits : Observatoire des pôles de compétitivité

***

A noter qu'un autre rapport de 2008, plus optimiste (notamment en ce qui concerne l'implication des PME-PMI), des cabinets de conseil CM International et Boston Consulting Group, a servi de base à l'évaluation réalisée par l'Assemblée Nationale. Ses principales recommandations au niveau national (cf. rapport où elles sont explicitées) sont les suivantes :
  1. Consolider et inscrire dans la durée la dynamique positive de coopération autour del’innovation engagée depuis 2005 grâce aux pôles de compétitivité
  2. Responsabiliser plus fortement les acteurs des pôles de compétitivité en évoluant vers une logique de contractualisation et de contrôle a posteriori, dans un environnement local simplifié (Etat et collectivités territoriales)
  3. Réaffirmer l'engagement de l'Etat autour des pôles de compétitivité et en développer la dimension de pilotage stratégique du dispositif
  4. Maintenir les financements de projets collaboratifs de R&D et poursuivre l'optimisation des circuits de financement des projets en renforçant leur cohérence globale
  5. Intégrer plus fortement la politique des pôles de compétitivité dans l’ensemble des politiques de recherche et d’appui à l’innovation
***

Plusieurs pôles de compétitivité concernent plus particulièrement le secteur défense :
  • Aerospace Valley : naturellement basé dans le Sud-Ouest, réunissant la plupart des leaders mondiaux de l'aéronautique (EADS, Boeing, Thales, Dassault...) et des centres de recherche de premier plan (ONERA, CNES...)
  • System@tic : situé en région parisienne, représentant l'équivalent de 100 000 emplois, il est consacré à la conception et à la fabrication de systèmes dit "complexes", mobilisant des Technologies de l'Information et de la Communication. Près de 80 grands groupes en font partie, notamment Thales, Alcaltel, Airbus, HP, SAFRAN, STMicroelectronics, Altran...il réunit également de nombreux établissements d'enseignement supérieurs prestigieux : Polytechnique, ENSTA, Ponts, ENS, HEC, ESSEC, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines...
  • Solutions Communicantes Sécurisées : comme son nom l'indique, il traite de tout ce qui touche aux réseaux et communications sécurisés. Basé en PACA, il réunit des acteurs comme Thales, Amadeus, Altran, Atos, IBM ou l'INRIA
Les trois pôles cités ci-dessus ont un rayonnement mondial. On peut également mentionner les pôles Images & Réseaux, Route des Lasers ou Mer Bretagne / Mer PACA

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mardi 19 mai 2009

[Le blog de la semaine] : Ifriqiya

Il n'y a pas si longtemps, j'écrivais ici qu'il me semblait que la blogosphère française de défense avait un trou dans la raquette : l'Afrique y est très peu présente, hormis en ce qui concerne le terrorisme et la piraterie.

Stéphane Mantoux, le déjà très prolifique et très lu auteur d'Historicoblog(2), se propose d'y remédier en partie au travers du blog Ifriqiya, ayant pour principaux thèmes l'histoire, la politique et la défense du continent.

Bienvenue donc à un nouveau blog pas si nouveau, même si apparemment tout n'est pas encore en place.

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lundi 18 mai 2009

Vie du blog : changement d'outil de mesure de l'audience

Suite à quelques petits soucis (visites non comptabilisées) avec Statcounter, je viens d'installer l'outil de mesure d'audience Sitemeter.

On verra si leurs mesures concordent. D'ailleurs, si vous connaissez d'autres outils fiables, je suis preneur.

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Le désarmement, tout un business !

La réduction des arsenaux n'est pas une mauvaise affaire pour tous les industriels.


La Convention d'Oslo signée le 3 décembre 2008 par une centaine de pays impose à ces derniers l'arrêt de l'utilisation, de la production, de l'acquisition ou du transfert de bombes à sous-munitions, ainsi que la destruction totale de leurs stocks d'ici 8 ans. Parmi les signataires figurent la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni ou l'Australie. Au contraire, les États-Unis, la Chine et la Russie n'en font pas partie. Une remarque en passant, le texte de la convention concerne les munitions libérant au moins 10 sous-munitions de moins de 20kg chacune. Donc la France, par exemple, va pouvoir conserver ses obus Bonus (2 sous-munitions) et ses missiles Apache (sous-munition de 50kg).

Un missile Apache
crédits : Air University

Nammo Group, entreprise norvégienne (en fait possédée à 50% par l'Etat norvégien et à 50% par Patria, société de défense finlandaise) spécialisée dans la fabrication de munitions, paraît être l'un des acteurs les mieux placés au niveau mondial pour se tailler la part du lion de la mise au rebut de ses munitions. Fin avril elle a d'ailleurs débuté l'exécution d'un contrat avec l'armée norvégienne dans cette optique, portant sur des obus d'artillerie. En 2007, 40% des munitions d'artillerie norvégiennes étaient à sous-munitions. Il faut ici noter que comme le nom de la convention l'indique, la Norvège a été fortement moteur dans cette initiative. Et le fait que ses propres forces armées soient les premières à franchir le pas de la destruction se veut une invitation à faire de même. Le Royaume-Uni a également sollicité Nammo pour le même type de prestation, mais avec, en plus des éléments d'artillerie, des munitions air-sol. Bien sûr, la division "Demil" de l'entreprise n'est pas celle qui dégage le plus gros chiffre d'affaires, mais elle permet de mettre en avant une image qui se veut plus propre. Dans tous les sens du terme, puisque Nammo se vante de privilégier une approche "eco-fiendly".

En ce qui concerne le processus, il s'agit tout d'abord de désassembler les munitions (qui contiennent plusieurs dizaines de sous-munitions) dans un environnement sécurisé, puis de les détruire par détonation. Namma fait ça à 900 mètres de profondeur, au sein d'un milieu rocheux.

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samedi 16 mai 2009

Vie du blog : le poids des mots, le choc des photos

Récemment converti au recours à des photos illustratives pour mes articles, je note qu'elles constituent une source non négligeable de trafic (de l'ordre de 10% à ce stade). A développer donc...

Sinon, j'ai réussi à retarder l'échéance pendant deux semaines, mais le ralentissement annoncé récemment va se confirmer sur la période à venir. Il va devenir assez difficile pour moi d'écrire sur la base d'un article par jour en raison d'obligations professionnelles très intenses, a priori jusqu'à mi-juin.

D'autant que je suis assez horripilé de constater que, en écrivant à toute vitesse
  • je laisse un nombre non négligeable de fautes d'orthographe et de frappe
  • j'ai du mal à entrer vraiment dans le fond et à bien "sourcer" ma prose
Un soldat en permission, 1914
crédits : Jean-Pierre Wilsch

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vendredi 15 mai 2009

Les écoles d'ingénieurs forment-elles encore des ingénieurs ?

Pour faire suite à un précédent article sur les entreprises préférés des futurs ingénieurs français, et pour rebondir en même temps sur un post d'Olivier Kempf sur l'orientation professionnelle des diplômés de Saint-Cyr, je souhaite un peu élargir le débat à l'ensemble des écoles d'ingénieurs, françaises, et principalement les plus prestigieuses : Polytechnique, Centrale, Mines, Ponts, Supélec, Supaéro, Ensam, ENSTA...

Car si la question de la carrière militaire se pose pour les Cyrards, celle d'ingénieur tout court se pose pour les écoles citées ci-dessus. En effet, et la tertiarisation de l'économie n'y est pas pour rien, les traditionnels débouchés dans les métiers de la production, du génie industriel ou de la R&D sont depuis assez longtemps concurrencés par le marketing, le commerce, le conseil (sous toutes ses formes, de la stratégie aux systèmes d'information), l'audit et surtout, salaire oblige, la finance. Les écoles d'ingénieurs ne sont pas les seules concernées, puisque même Sciences Po a sa majeure finance. Bien évidemment, la crise économique actuelle pourrait, selon certains, rebattre les cartes en faveur de l'industrie, les embauches dans le secteur financier étant encore plus timide que dans les autres domaines. Mais rien n'est moins sûr pour le moyen terme.

Alors bien sûr, la majorité des jeunes diplômés (majorité devenant écrasante dans les écoles spécialisées type ENSI, mais c'est bien normal) s'engagent dans une carrière d'ingénieur, cependant une part de plus en plus grande investit des chasses anciennement gardées des écoles de gestion et de commerce, les HEC / ESSEC / ESCP et consorts...que ce soit au niveau des secteurs de l'économie ou des fonctions dans l'entreprise. L'essor du concept d' "ingénieur généraliste", touche à tout, formé superficiellement à de nombreux domaines, et censé pouvoir prendre du recul tout en s'adaptant facilement à tout nouveau contexte, est concomitant à ce phénomène : les formations d'ingénieurs, parmi les plus côtées, offrent presque autant d'heures de cours en management (au sens large) qu'en sciences de l'ingénieur. Pour en avoir discuté avec des camarades d'anciennes promotions, certains pensent que c'est une perversion du concept d'ingénieur, qui se doit au contraire d'être au coeur de l'invention, du perfectionnement et de la pratique de nouvelles techniques et technologies, et non pas se préoccuper de problématiques financières, commerciales ou support (RH, marketing...) : tout ça est à laisser aux épiciers.

Exemple pris pas totalement au hasard, l'ENSTA (Ecole Nationale Supérieure des Techniques Avancées), sous la tutelle du Ministère de la Défense (plus précisément, de la DGA) et dirigée par un ingénieur général de l'armement. École d'application de l'X, elle forme entre autres les ingénieurs du Corps de l'Armement (et certains officiers des armées). Selon la plus récente étude de placement, la somme des jeunes diplômés des dernières promotions travaillant dans l'audit-conseil/fonction financière/direction-management/achats-logistique/marketing-vente/autres (non R&D/production/systèmes d'information/assistance technique) s'élève à 40%.

En soi, qu'une école offre à ses élèves de nombreux débouchés est un atout. Et il y a bien sûr de très intéressantes carrières en dehors de l'ingénierie. Pour aller encore plus loin, une formation d'ingénieur peut être un sérieux atout dans un contexte non-scientifique.

Cependant, le fait qu'une part non négligeable des meilleurs potentiels ingénieurs et scientifiques français se dirigent vers une toute autre voie est-il problématique ? Déjà, juste une remarque : encore heureux que chacun, quel que soit son potentiel, puisse avoir le choix de ses études et de sa carrière (dans la limite des places disponibles, naturellement...).

Considérons le système éducatif français : entre 16 et 20 ans, tout ou presque se joue pour l'accès aux filières sélectives. Bac, choix d'orientation supérieure, concours aux grandes écoles (et leur part de loterie). Les écoles d'ingénieurs étant vues comme une des principales voies royales, de nombreuses lycéens bons ou pas trop mauvais en sciences s'engagent en prépa. Évidemment, jusqu'au lycée la plupart n'ont qu'une vision réduite de ce qu'est vraiment la science (maths, physique...) et des débouchés qu'elle offre, alors le métier d'ingénieur, c'est très loin... Donc finalement pas étonnant qu'après 3, 4 ou 5 années d'études de nombreux élèves ingénieurs se tournent vers d'autres voies, qui selon la période sont plus ou moins porteuses. D'ailleurs, les recruteurs ne s'y trompent pas, et utilisent la sélectivité des concours d'entrée aux écoles (qui a lieu au minimum 3 ans avant le recrutement !) mais également l'aspect "généraliste" et ouvert des formations pour embaucher des jeunes prometteurs, parfois dans des domaines assez éloignés de leur cursus d'origine.

On en vient là à une certaine contorsion du système : en fonction des débouchés et du contexte économique, mais également (cercle vertueux/vicieux) des souhaits des étudiants, les écoles d'ingénieurs élargissent leur offre de formation, quitte à sortir carrément de la notion d'ingénieur, mais sans élargir outre-mesure leur base de recrutement, qui reste de façon prépondérante LE concours d'entrée destiné aux prépas scientifiques. Certes, cela passe parfois (souvent ?) par des partenariats avec des écoles ou formations universitaires en management/gestion.

Contrairement à une idée reçue, le système éducatif français n'est pas le seul à disposer de filières d'ingénierie d'élite. Par contre, c'est le seul dans lequel ces filières se matérialisent dans des petites écoles indépendantes (de l'ordre de quelques centaines d'étudiants), et non au sein d'universités plus larges. Ce benchmark avec ce qui se passe à l'international n'est pas anodin : aujourd'hui, et plus encore demain, l'éducation supérieure est et sera un marché de plus en plus mondialisé. Si bien qu'en plus de la concurrence 1/ entre écoles d'ingénieurs 2/ entre écoles d'ingénieurs et écoles de commerce, la compétition se fait aussi avec les formations étrangères. En témoignent l'émergence de classements internationaux, non plus limités aux MBA. Ces classements se font non pas seulement sur les formations mais également sur les établissements dans leur ensemble. Le classement de Shanghai, reléguant aux limbes nos champions nationaux, a fait couler beaucoup d'encre...notamment chez nous, les uns et les autres tentant soit d'expliquer qu'en France c'est "différent", soit y voyant un argument pour telle ou telle réforme de l'enseignement supérieur. L'Ecole des Mines de Paris y est allée de son classement mondial maison, avec pour critère exclusif le nombre de patrons des 500 plus grands groupes mondiaux : reproduction des élites au sein de nos grandes entreprises oblige, les X-HEC-ENA et Mines (surtout en tant qu'école d'application de Polytechnique, au passage) s'y taillent la part du lion.

Alors, il n'est pas question ici de lancer le débat "grandes écoles" VS "universités" ni de proner une fusion pure et simple. Ceci dit, il est peut-être temps pour nos écoles d'ingénieurs de reconsidérer leur positionnement, pourquoi pas comme étant les "pôles ingénierie" d'ensembles plus vastes, ayant nécessairement plus de moyens...et surtout de casser cet éclatement qui fait que chaque initiative, prise au niveau de chaque école, ne concerne que quelques centaines d'élèves, et qu'elle est à dupliquer dans les autres écoles. Des projets comme Paris Tech sont bien évidemment à saluer comme allant dans le bon sens, celui d'une coopération renforcée entre grandes écoles, leur permettant à la fois d'acquérir une taille critique pour la visibilité internationale, mais offrant aussi plus de passerelles à leurs élèves, histoire de mettre en valeur plus de facettes du métier d'ingénieur.

Je vous conseille au passage la lecture du très bon ouvrage de Pierre Veltz, ancien directeur de l'Ecole des Ponts, Faut-il sauver les grandes écoles ?
J'ai conscience d'avoir un peu élargi le sujet que je comptais aborder initialement, et en même temps qu'il reste beaucoup à dire. J'y reviendrai donc, c'est certain, même si le lien avec la défense est assez distendu. Mais après tout, c'est mon blog, donc je suis maître pour décider ce qui est hors-sujet ou non ;-)

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jeudi 14 mai 2009

PowerPoint c'est bien, en abuser ça craint !

Olivier Kempf a récemment publié sur son blog un article sur le lien entre RMA et néocons aux États-Unis. Je voudrais évoquer ici un sujet connexe, concernant une tendance montante au sein des armées : le recours à PowerPoint, l'outil de la suite bureautique Microsoft Office bien connu de tous les salariés d'entreprise. Il n'y a de lien de cause à effet entre son utilisation et la doctrine néoconservatrice, mais plutôt une concomitance dans la montée en puissance au cours de la dernière décennie (forcément liée, par ailleurs, à la maturité du logiciel).

En tant que consultant dans le secteur privé, j'utilise PowerPoint tous les jours, et plutôt deux fois qu'une. Rien d'anormal à cela, puisqu'il est devenu la norme de présentation à tous les niveaux de l'entreprise, du plus stratégique au plus opérationnel. Avec un peu de maîtrise de fond et de forme, c'est un logiciel qui permet de faire passer efficacement et rapidement ses idées, à l'aide de schémas simples (cf. par exemple les nombreux sites et blogs qui donnent ou vendent des conseils sur la meilleure manière de formater les planches PowerPoint et de faire passer ses messages de façon convaincante).

Comme la fameuse citation attribuée à Napoléon le dit si bien
Un bon croquis vaut mieux qu'un long discours
C'est donc principalement un outil de communication, bien qu'évidemment, il ne puisse se substituer par lui-même à l'orateur, par lequel l'essentiel des messages passe. Un des principaux soucis est qu'il est tentant d'oublier qu'un support PowerPoint présenté en réunion ou briefing n'est qu'une restitution synthétique sur un sujet donné, et en aucun cas une encyclopédie exhaustive sur ledit sujet : il s'agit simplement d'être capable de faire ressortir les messages forts, sans forcément rentrer dans le détail, d'autant qu'en général, en haut lieu, les gens ont un planning très chargé et peu d'appétence pour le détail. Et un support de soutenance orale efficace est nécessairement aéré et concis, avec peu d'éléments rédigés et de longues phrases. Autrement dit, l'écueil majeur est la simplification à outrance, passant très souvent par le mensonge par omission (volontaire ou pas) : ce qui n'est pas sur le support n'existe pas. D'autant que c'est bien connu, il faut savoir prioriser les sujets : la tentation de la démonstration en trois points, pas un de plus, est très forte.

Un autre problème avec le support PowerPoint est la pensée magique qui voudrait que ce qui est représenté reflète nécessairement la réalité. Attention, ce n'est ni un outil de modélisation, ni un outil de planification. Et ce n'est pas parce que deux boîtes sont reliés par une flèche qu'il existe une relation de cause à effet entre elles. La boîte à outil graphique qu'offre PowerPoint peut être trompeuse sur ce point, pour un auditoire non averti, ou qui se satisfait d'une simplification extrême.

L'armée n'est pas épargnée par la montée en puissance de ce logiciel, notamment de l'autre côté de l'Atlantique. Il n'y a qu'à voir des sites comme Army Study Guide ou Military .PPT Classes. La plupart des briefings et des réunions de planification stratégiques, mais aussi des formations "théoriques", depuis le début des années 2000, ont pour support une présentation PowerPoint. Ceci s'est fait au détriment de supports plus rédigés, forcément moins sexy et moins digestes, mais peut-être aussi plus complets.

Donald Rumfeld, secrétaire à la Défense de George Bush de 2001 à 2006, avait souhaité introduire des "bonnes pratiques" de management de l'entreprise au Pentagone, afin de rendre l'administration plus efficace. Ceci avait entraîné un recours intensif à PowerPoint, notamment dans l'optique de la préparation de l'invasion et de la reconstruction de l'Irak. C'est ce que raconte Thomas E. Ricks dans son ouvrage Fiasco: The American Military Adventure in Iraq, ajoutant ainsi une raison à la situation très embourbée actuelle. Ainsi, les décideurs se sont laissés convaincre par des idées présentées de manière élégante et simple, à l'aide de petits schémas, sans forcément aller au-delà pour éprouver la solidité des arguments qui les sous-tendaient. De même, les plans de bataille étaient diffusés sous la formes de supports PowerPoint imprimés. Il semblerait que depuis le départ de Rumsfeld, cette pratique du PowerPoint tout azimut n'ait pas survécu au Pentagone.

La victoire en Irak, c'est pas si compliqué sous PowerPoint !
Crédits : Thomas Ricks

Qu'on ne s'y trompe pas, PowerPoint est un outil très utile, mais qui doit être confiné à ce pour quoi il a été conçu. Une belle présentation ne se substitue pas à l'étude de fond qui a permis de la constituer. Une planification stratégique n'est pas une conférence publique de Bill Gates ou Al Gore, durant laquelle le support n'est souvent qu'un faire-valoir secondaire devant le charisme de l'orateur.

Pour finir, une citation de Thomas E. Ricks :
That reliance on slides rather than formal written orders seemed to some military professionals to capture the essence of Rumsfeld's amateurish approach to war planning

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mercredi 13 mai 2009

[Le blog de la semaine] : Guerres d'aujourd'hui

Parce que, comme l'indique son auteur, "le recours à la guerre demeure un mode d'action politique présent en tous points du monde", Guerres d'aujourd'hui se veut, au travers d'articles très courts, l'image des engagements actuels.

Faisant la part belle aux photos, avec des textes français ou anglais (on peut regretter cependant le fait que les sources ne soient pas citées), il montre des soldats de tous pays dans leur activité quotidienne, principalement en opérations mais pas uniquement, puisqu'on peut également voir des parades et autres cérémonies. Irak, Afghanistan, Palestine ou Inde sont bien sûr mis en avant. On note toutefois la place de choix faite à la Bundeswehr, de même que la quasi exclusivité accordée au milieu terrestre.

La publication d'articles n'est pas extrêmement régulière, mais elle est souvent regroupée en début ou fin de mois. Un blog qui se pose donc comme une vitrine, un regard instantané et direct sur les conflits et la réalité du terrain de notre époque.

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mardi 12 mai 2009

[Le B.A.-BA] : le C4ISTAR

Sigle le plus complexe relatif aux concepts de guerre en réseau, le C4ISTAR, issu de la doctrine américaine (mais également britannique), couvre l'ensemble des domaines relatifs au recueil, à la synthèse et à la transmission de l'information. Essayons d'y voir plus clair au travers d'une description succincte de ses différentes composantes.

ISTAR

L'ISTAR (Intelligence - au sens anglo-saxon, Surveillance, Target Acquisition, Reconnaissance) recouvre tout ce qui touche à la collecte d'information, au travers de l'ensemble des sources disponibles. L'essor des senseurs et capteurs en tous genres a permis son fort développement, principalement aux États-Unis, même si les Européens essaient de rattraper leur retard.

L'objectif du sous-ensemble ISR est de disposer d'une vision la plus complète possible du théâtre des opérations, et pour se faire les tenants du Network Centric Warfare indiquent qu'il est primordial de multiplier les sources de données : radars aériens, imagerie satellite, capteurs infrarouge, observation humaine (notamment aux moyens de caméras optiques), drones... L'enjeu est de diminuer le brouillard de guerre pour son propre compte.

La Target Acquisition (acquisition de cible) en est le prolongement naturel : le positionnement précis, au travers de divers moyens, d'une cible ennemie, et la communication de ce positionnement, notamment au travers du GPS américain, permet de faciliter sa destruction.

Le I (renseignement militaire) est particulièrement important car, contrairement au STAR qui met l'accent sur les méthodes de recueil de l'information, il exprime le fait que cette information doit être intégrée dans un processus global de compréhension du terrain et de renseignement, au service de la prise de décision et in fine de la tactique/stratégie militaire.

Bien sûr, il existe un certain nombre variations autour du terme ISTAR, selon où l'on souhaite placer l'emphase. Le terme sert également à désigner les unités ou matériels spécialement affectés à cet ensemble d'activités.

Un mini-drone de reconnaissance Allied Aerospace de la famille iSTAR

Crédits : defense update

C4

Le C4 (Command, Control, Communications, Computers) recouvre lui aussi plusieurs réalités. D'une manière générale, le C2 (Command & Control) se réfère simplement à la capacité du commandement à diriger l'emploi des forces dans l'atteinte d'un objectif.

L'apport (ou disons plutôt la nouveauté) des concepts liés à la guerre en réseau réside dans l'ajout de la dimension Communications, qui indique clairement l'importance de l'échange d'information dans la coordination globale (verticale et horizontale), et de Computers, qui reflète l'aspect crucial de la quatrième dimension dans les guerres modernes.

Le C4 consiste donc à la transmission de l'information collectée par l'ISTAR, après retraitement éventuel, auprès des interlocuteurs adéquats selon l'architecture de commandement préalablement définie. Comme le souligne Jean-Pierre Maulny dans La Guerre en réseau au XXIème siècle, il existe là une divergence d'envergure entre les Etats-Unis et les Européens, non pas seulement sur les moyens technologiques, mais également sur la structure globale de cette architecture. Les Américains privilégiant une approche dans laquelle les boucles de décision
  • sont très courtes (entre le senseur et l'effecteur)
  • reposent sur des quantités très importantes d'information (non assez filtrées) échangées
  • peuvent court-circuiter les décideurs politiques, la force devant être utilisée très rapidement et très massivement afin de gagner la guerre
La mise en œuvre du C4 se fait au travers de programmes tels que les liaisons de données tactiques (permettant notamment la fusion d'information provenant de plusieurs sources), les satellites de communications (par exemple la constellation Syracuse III pour la France), les réseaux de radios mobiles (comme le JTRS déjà évoqué ici) ou plus globalement l'ensemble des réseaux de communications militaires, qu'ils reposent sur des protocoles Internet (IP) ou non. On peut évoquer SOCRATE, Système Opérationnel Composé des Réseaux des Armées pour les TElécommunications, dont le niveau d'interopérabilité doit être étendu au travers de SOCRATE NG (Nouvelle Génération) à horizon 2015. Et bien sûr, au-dessus des réseaux d'échanges, les systèmes d'information (tactiques, opérationnels ou stratégiques) permettent aux acteurs humains de visualiser l'information agrégée (le champ de bataille numérisé) et d'échanger entre eux. Bien sûr, tous ces composants sont intégrés au sein de systèmes plus globaux, réunissant au sein d'un socle commun les aspects Information et Communication, comme par exemple la MOIE SIC Terre (Maîtrise d'Oeuvre Industrielle d'Ensemble des Systèmes d'Information et de Communications de l'Armée de Terre française), actuellement en cours de développement par Thales et EADS principalement.

Un système de Command & Control opérationnel

Crédits : General Dynamics Canada

Évidemment, il n'y a pas de séquence stricte ISTAR => C4, mais plutôt un enchevêtrement complexe de boucles de décision, d'action et de rétroaction, censé permettre l'optimisation de la situational awareness. On voit ici clairement l'importance de l'interopérabilité entre l'ensemble des composantes, afin de fluidifier la transmission et la compréhension de l'information...notamment dans un contexte interalliés. Et bien sûr, tout cela coûte extrêmement cher, surtout s'il s'agit de se conformer à la lettre de la doctrine, selon laquelle toutes les unités (véhicules, drones, systèmes d'armes, soldats...) doivent être intégrées d'un même réseau, pouvoir échanger en temps réel et dont le commandement peut, à chaque niveau de l'échelon, disposer d'une vision synthétique mais néanmoins exhaustive...

N.B. : il existe également un nombre assez impressionnant de combinaisons des différentes éléments du C4ISR : C2I, C2ISR...

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lundi 11 mai 2009

L'internationalisation d'EADS passera par l'Inde

EADS Defense & Security et Larsen & Toubro, une société d'ingénierie indienne (d'ailleurs fondée par deux expatriés danois, d'où son nom), ont annoncé le 5 mai la création prochaine d'une joint-venture dans le domaine de l'électronique de défense, basée près de Pune.

Le choix de l'Inde est assez simple pour EADS, qui souhaite d'une manière globale internationaliser sa production et sortir de ses bases européennes. La principale raison en est la forte hausse du marché intérieur en termes d'armement, pour faire face aux voisins pakistanais et chinois mais également aux menaces terroristes perçues comme grandissantes. La modernisation de l'armée indienne, qui désire remplacer son matériel russe vieillissant, est à l'origine d'une augmentation conséquente du budget de défense (de l'ordre de 25% par rapport à l'an dernier). Bien sûr, impossible d'accéder au marché indien sans montrer patte blanche, la production locale étant interdite à toute entreprise dont le capital est possédé à plus de 20% par des étrangers. D'où, pour prétendre à la multidomesticité, la nécessité de passer par une joint-venture avec des partenaires locaux.

Les activités de la société pour le moment sans nom seront principalement concentrées sur la guerre électronique, l'avionique (électronique embarquée dans des aéronefs) militaire et les radars. L'ensemble de la chaîne de valeur, depuis la conception à la fabrication en passant par le développement, sera maîtrisé par l'entité.

L'objectif initial de ventes s'élève à 500M$ sur les cinq à sept années qui viennent. A terme, il est prévu de pouvoir se projeter hors des frontières indiennes vers d'autres pays asiatiques. Mais quid de la concurrence (disons, dans un futur très lointain) avec les entités basées en Europe, et ayant fatalement des coûts de production plus élevés ? Car tel est, on le voit notamment dans l'industrie automobile, le dilemme qui se pose aux entreprises multidomestiques : la tentation peut être grande de privilégier, et pas uniquement pour la fabrication, les unités basées dans les zones low cost, surtout quand petit à petit elles sont montées en compétences et maîtrisent des activités à forte valeur ajoutée.

Pune by night
Crédits : kodachi.com


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dimanche 10 mai 2009

Tchad : quelques sources d'information tchadiennes

A l'heure où les combats font rage au Tchad, voici quelques sources d'information "de l'intérieur", plus ou moins partisanes, mais toujours intéressantes :

  • Tchad Actuel : anti-Déby, reprend partiellement la presse locale
  • laleonline : fondé dans les années 90 par un groupe de jeunes Tchadiens, assez ouvertement hostile à Idriss Déby
  • Alwihda : journal en ligne du mouvement d'opposition Front National du Tchad Rénové
  • Ramajdi : en anglais, ayant un layout proche de laleonline, lancé en 2003, ouvertement pour la Défense des Droits de l'Homme au Tchad
  • ialtchad : portail de présentation et d'information sur le Tchad
  • Zoom sur le Tchad : opposé à Déby, très critique envers la France
En complément :

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samedi 9 mai 2009

USA : envoi officiel de la proposition de budget 2010 au Congrès

Avant hier a été diffusée auprès du Congrès la proposition officielle de Barack Obama de budget de la Défense pour l'année fiscale 2010. le Secrétaire à la Défense, Robert Gates, avait déjà présenté ce budget à la presse il y a un mois. Il s'élève à un total de 663,8 G$, soit 533,8 G$ pour financer les programmes d'armement et 130 G$ pour les engagements extérieurs, principalement en Irak et en Afghanistan.

Une synthèse des principaux axes retenus est disponible ici. Robert Gates affirme à propos de ce budget :
It provides the balance necessary to institutionalize and finance our capabilities to fight the wars we are in today and the scenarios we are most likely to face in the years ahead, while at the same time providing a hedge against other risks and contingencies
Pour une analyse de ce budget, voir le petit article que j'avais rédigé en avril :

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vendredi 8 mai 2009

[Le blog de la semaine] : Missile Monitor

Une fois n'est pas coutume, voici un blog anglophone : Missile Monitor, comme son nom l'indique, suit le développement de la plupart des missiles balistiques et de croisière tout autour du monde.

L'auteur y dresse un panorama des principales actualités sur le sujet, qu'il s'agisse purement de "développement produit", de vente d'armes ou d'évènements dont la portée politique est majeure. On y parle donc naturellement du bouclier antimissile, de la Corée du Nord et de l'Iran, entre autres. Bien sûr, la majorité des informations tournent autour des États-Unis, directement ou indirectement, et de son dispositif de dissuasion. A noter qu'il n'y a pas un seul article (sur un total de 150 depuis la création du blog en octobre 2007) ayant "France" pour tag, contre 24 pour "Iran", 37 pour "India" ou 51 pour "Russia". Assez étrange pour un blog dont un des buts avoués est de suivre le sujet de la prolifération.

En sommeil depuis février, il a repris du service la semaine dernière. Son rythme tourne autour de 5 à 10 articles par mois, mais est assez irrégulier. Y jeter un œil de temps en temps pour rester à la page...

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jeudi 7 mai 2009

50 Cent Army contre Netizens

Je parlais récemment de l'utilisation du titre de "consultant" pour la promotion masquée d'idées passant pour neutres et objectives. Il se pourrait que la Chine, dont a vu quelle est au centre de questions relatives au cyberespionnage de masse, ait, depuis quelque temps, décidé de passer la vitesse supérieure.

Il est évident que l'internet chinois est soumis à un contrôle drastique. On ne développera pas ici les histoires concernant Google ou Yahoo, qui se sont pliés de bonne ou mauvaise grâce aux desiderata de Beijing. Mais au-delà du contrôle des flux d'informations par les organismes officiels, principalement matérialisé au sein du Golden Shield Project (projet global de censure et de surveillance, orchestré par le Ministère de la Sécurité Publique depuis une dizaine d'années), le gouvernement chinois a compris qu'il devait, face aux nouveaux usages du Web en pleine explosion adopter une approche un peu différente. Des sources évoquent l'existence d'une armée formée de particuliers, qui se chargerait de relayer les positions officielles sur les chats, forums internet et les plates-formes Web 2.0, notamment les blogs et les micro-blogs (de type Twitter). Et puisque chaque contribution pro-Beijing serait rétribuée, on a appelé ces zélés citoyens les Wumaodang (五毛党), wu mao représentant 50 centimes de yuan, soit environ 5 centimes d'euro. Favorisée par les évènements du Tibet, du Sichuan et les Jeux Olympiques de 2008, qui ont attiré les yeux du monde entier sur le pays, cette "organisation" existerait depuis 2005. Elle sévit principalement sur la Webosphère chinoise, y délivrant la bonne parole du Parti et combattant sans relâche toute velléité contestataire. Tous les sujets y passent : Tibet, Afrique, relations avec les USA, politique intérieure, santé publique...Parce que l'Internet n'est pas arrêté par la Grande Muraille, il semblerait également que la 50 Cent Army étende ses activités sur des sites en anglais. Selon certaines sources, elle compterait plusieurs centaines de milliers de membres, et il existerait même des sessions de recrutement et de formation quasi-officielles.

Le Web 2.0, dans son esprit, est fortement participatif et collaboratif, et son volume augmente à un rythme exponentiel, que ce soit au travers des blogs, des plates-formes d'échanges de vidéos ou des réseaux sociaux. Fatalement, les internautes, notamment les plus jeunes, y échangent des informations et des idées, avec potentiellement la Terre entière comme audience. Il est donc naturel qu'un régime autoritaire ayant un penchant paranoïaque comme le PCC, voyant l'impact et l'importance du cyberespace "public", cherche à y établir et diffuser sa propagande, tout en empêchant la propagation de toute information venant la contredire. Dans l'idée, on a déjà vu, notamment avec l'exemple de l'opération Plomb Durci, que le Web 2.0 devenait un terrain naturel de propagande. D'ailleurs, il semble que la Russie possède également ses brigades du Web.

La Chine, pays de la démesure, innove par l'ampleur (supposée) du phénomène. A plusieurs centaines de milliers, il est possible d'investir un grand nombre de sites, forums et communautés virtuelles pour tenter de formater, de façon proactive, une opinion publique qui sait se montrer (de plus en plus, du fat de l'ouverture économique ?) critique. Il ne s'agit donc pas uniquement de repérer et dénoncer les idées jugées déviantes, mais bien de se positionner en "faiseurs d'opinion". Et vu leur nombre, la réactivité est impressionnante : le temps de réponse à un évènement (une catastrophe naturelle, une révolte) est quasiment nul.

La 50 Cent Army est un exemple de ce que les Américains appellent l'astroturfing. Ce terme désigne une campagne politique ou marketing qui donne l'impression d'être spontanée et émanant de citoyens/consommateurs isolés et non-organisés, alors qu'en fait elle a été savamment orchestrée. Le terme provient d'AstroTurf, une marque de gazon artificiel, qui montre bien l'absence de naturel d'une telle approche. Si elle prend, son efficacité peut être redoutable, car il n'y a rien de tel que l'opinion "objective" d'une partie de la population, sur des sujets plus ou moins anodins, pour convaincre le plus grand nombre.

Bien sûr, il ne faut pas non plus croire qu'une telle démarche est certaine de réussir à créer une sorte de Big Brother 2.0. D'aucuns estiment, même si évidemment avec le temps les propagandistes deviennent de plus en plus fins et subtils, que les citoyens vigilants sont capables de les déjouer facilement. L'inventivité n'existe pas que du côté du PCC. En plus de ceux qui utilisent des réseaux sécurisés de type VPN pour communiquer, la jeune génération actuelle compte parmi ses rangs de nombreux Netizens (citoyens du Net) qui répondent, souvent par la satire, à la propagande officielle.

Tiens pour finir, une imagre d'une autre initiative chinoise tournant en dérision la cybercensure des officines gouvernementales.

Cao Ni Ma!
Crédits : wikipedia anglophone

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